Jeunesse en difficulté à Bistroff : la campagne pour repartir du bon pied
L'endroit est inattendu : un immeuble en forme de tipi dans la campagne de Bistroff, environs de Saint-Avold. « C'était la maison d'un millionnaire allemand », nous glisse-t-on. C'est désormais une « bulle d'R » : un centre d'accueil pour l'Aide sociale à l'enfance. Le bâtiment avait été astucieusement récupéré par l'interco de Saint-Avold Synergie, il y a quelques années.
Quatre jeunes habitent sur place. La structure, gérée par le CMSEA et le Département de la Moselle, peut en accueillir sept. « Nous ne sommes pas dans la statistique, explique Patrick Weiten, président du Département. Nous sommes dans l'accompagnement expérimental, en misant sur la ruralité : certes la protection de l'enfance est une compétence dévolue aux Départements, mais nous allons plus loin que la loi, car cette mission est une grande cause. »
Le Département gère 2 000 enfants dans différents types de structure. Tous les placements se font sur intervention d'un magistrat. Cette nouvelle Bulle d'R doit jouer un rôle expérimental. « Quand il y a un échec dans la structure d'accueil d'origine (type Maisons d'Enfants à Caractère Social), on peut imaginer un placement ici pour retrouver de l'élan », explique Philippe Hovasse, directeur du site. Le caractère expérimental repose sur deux facteurs : la mise au vert, puisque le « tipi » est en pleine campagne, et la « continuité de l'accompagnement, souligne Benjamin, éducateur. Nos rotations se font sur 72 heures de présence, minimum. Il y a en moyenne trois éducateurs tous les jours. Dans une structure classique, les missions se font sur huit heures de postes. La qualité de l'accompagnement, mais aussi la transmission des informations, sont plus poussés. »
Parcours jalonné d'ateliers
Sept éducateurs sont mobilisés sur ce projet. Les jeunes placés dans la bulle d'R y resteront « entre un et quatre mois ». Le parcours est jalonné d'ateliers (dont la réfection du terrain de tennis attenant), de rencontres professionnelles, mais aussi de sorties. « Il faut ressentir un sentiment de coupure en arrivant ici, commente Benjamin, l'éducateur. L'impulsion du changement viendra de là. » Le président du CMSEA, Gilles Thepot, a souligné l'adaptation qu'implique le franchissement d'une adolescence difficile. Il a évoqué « l'incertitude et l'angoisse du changement. » Traduit avec la justesse des mots de Nicolas Mathieu, dans le désormais célèbre livre Leurs enfants après eux : « Sans cesse, il avait envie de cogner, de se faire mal, de foncer dans les murs. »
Article et photographie parus dans Le Républicain Lorrain - Le 11 juillet 2023
